La
"méthode"
Dès l'implantation du jardin, j'ai eu l'idée de compléter mes
observations sur l'acclimatation par des plantations ailleurs,
réalisées par quelques essais de boutures ou rejets de reste, dans la
nature, d'abord isolés, puis de manière plus méthodique, afin d'avoir
de nombreux éléments de comparaison selon l'altitude, la position par
rapport au fond de vallée et la position plus ou moins interne en
montagne. Ils ont eu lieu essentiellement durant quatre années,
toujours
en mars-avril, afin d'assurer au mieux la reprise en période favorable
en température et humidité, tout en laissant à la plante le temps de
s'installer avant l'hiver suivant. Les plantations ont toujours été
faites en
milieu favorable: bien ensoleillé, sur terrain bien drainé (rochers
calcaires), le plus souvent sur pente à peu près au sud, plus ou moins
abrité des vents froids par le relief ou la végétation, parfois sur le
plat ou en exposition plus ventée, pour comparer. J'ai commencé
par planter des Opuntia stricta inermis et des Agave americana
americana
(le gris), dont je disposais abondament, puis ce fut bien plus
varié, avec même d'autres genres de cactus et autres succulentes. Je
prenais soin de choisir des zones très dégagées, afin qu'un ombrage de
la végétration environnante ne puisse se manifester avant longtemps
(disons, une vingtaine d'années). Je faisais un petit trou, juste
suffisant pour pouvoir planter et j'arrachais les herbes éventuelles à
proximité immédiate.
J'ai donc choisi des
facettes édapho-topographiques xérothermiques depuis les côteaux
mollassiques* au sud de Toulouse jusqu'aux chaînons calcaires de
moyenne
montagne dans le bassin de l'Ariège. Les altitudes variaient de 240 à
1375 m. Deux essais ont été pratiqués dans les garrigues du
Bas-Languedoc, comme référence de région déjà connue comme
favorable.
J'en profite pour signaler que je ne suis pour rien
dans l'implantation
du dangereux et envahissant
Cylindropuntia
rosea à Celles (34),
que le
Conservatoire du Littoral a dû éradiquer avant qu'il ne s'étende trop.
D'ailleurs quelques cas d'envahissement dans des circonstances
favorables font croire à des défenseurs de la nature influencés par
l'écologisme intégriste à la mode et qui connaissent mal la culture de
ces plantes, que toute introduction de plante exotique est un danger
pour la biodiversité. Il y a certes, des cas réels, notamment avec des
espèces qui se disséminent abondament par graines et que, rapidement,
on ne sait plus maîtriser, mais les plantes succulentes se reproduisent
surtout végétativement et les graines qui peuvent germer sont
surtout disséminées à proximité. De plus, beaucoup sont régulièrement
limitées par le froid, même en région méditerranéennes et celles qui ne
le sont pas, ne peuvent prendre de l'ampleur que sur des sols assez
profonds, mais où elles sont concurrencées par la végétation
naturelle. Dans
les quelques cas où elles deviennent envahissantes, il est donc facile
de les limiter ou de les éliminer. Dans le cas du Cylindropuntia rosea,
sa dissémination est favorisée par le fait que ses articles, munis d'un
crochet, s'accrochent facilement à la peau des animaux qui le touchent,
se détachent très facilement de la plante et finissent par se détacher
de la peau pour retomber sur le sol bien plus loin.
Premières
observations
Les premières observations peu après les premières plantations ont fait
apparaître deux entraves majeures à cette expérimentation, amplement
confirmées par la suite.
1° -
La
croissance des plantes est considérablement réduite par rapport à celle
obtenue au jardin, dans un volume suffisant de terre travaillée,
sans concurrence d'autres plantes, même sans apport d'engrais.
Il est évident que la concurrence des racines de la végétation
naturelle, déjà bien implantée dans le sol est trop forte, sous ce
climat, pour que les succulentes exotiques puissent se maintenir
de manière pérenne. Certes, certaines peuvent être envahissantes en
région méditerranéenne, mais c'est sur sol plus profond, sous climat
plus sec et de toutes façons, en laissant faire la nature, elles
finiraient pas être éliminées lors de l'installation inéluctable de la
forêt et même avant. Seules les situations où le sol est très réduit,
là où les
succulentes locales sont déjà les seules à survivre, permettraient la
survie durable des exotiques les plus rustiques (le froid restant un
facteur limitant pour les autres), au prix d'un développement très
réduit.
Les autres essais réalisés par
d'autres personnes dans des conditions similaires, même en région
méditerranéennes (plantation dans la garrigue), montrent un
développement nul à modéré selon les situations. Manifestement, il est
fréquent qu'il n'y ait pas de formation de raquette chaque
année. Curieusement, celles qui apparaissent atteignent parfois une
taille normale.
2° -
Le
piétinement par les animaux sauvages ou domestiques (le
pâturage extensif est très fréquent) est un autre gros facteur
limitant: les plantes sont souvent plus ou moins arrachées, parfois
complètement, ce qui nécessite une reconstitutrion du système
racinaire, qui n'est pas faite pour accélérer la croissance! Les
raquettes sont souvent abîmées, voire cassées ou détachées, ce qui
limite le développement du pied-mère, tout en favorisant l'apparition
d'une petite colonie.
Afin d'y remédier,
autant que possible, j'ai évité les zones trop pâturées, planté à
l'écart des sentes tracées par le piétinement, choisi un microrelief
censé éviter le passge fréquent, disposé des pierres autour des plants
pour prévenir l'arrachement. Il est difficile de dire ce celà a limité
les dégâts, toujours présents.
Pour éviter le
prélèvement des plantes par des animaux plus évolués qui les trouvent
belles et qui peuvent se servir en passant par là, j'ai pris soin de
choisir des endroits aussi peu fréquentés que possible et hors
de vue depuis les sentiers.
Entre tout, on observe les traces de nombreux accidents, climatiques ou
autres: articles ou feuilles cassés, plus ou moins pourris ou séchés.
Même si la plante repousse, tout celà contribue à un faible
développement. En outre, les articles sont souvent petits ou (et)
jaunes, ce qui contribue à limiter la nourriture de la plante. Parfois,
certaines plantes sont dans un
tel
état qu'elles sont difficilement reconnaissables.
Visite
systématique des sites au bout d'une dizaine d'années
Je l'ai effectuée de septembre 2009 à avril 2010. La majorité des
plantations dataient des printemps 1998 à 2000. Il s'était donc écoulé
de 10 à 12 saisons de pousse et les plantes avaient subi de 9 à 12
hivers, de rigueur variable. Les coups de froids les plus dommageables
au jardin ont été le gel modéré (-8°) mais continu de trois jours en
décembre
2001, la vague de froid de février-mars 2005 (jusqu'à -11° au jardin)
et, pour
les stations visitées au printemps, la succession d'épisodes neigeux et
de gel de l'hiver 2009-10, malgré un minimum de seulement -8. Cette
période donne donc de bonnes
informations sur la rusticité en dehors des grandes vagues de
froid trentenaires. Si j'en vis une, il sera intéressant de revisiter
ensuite les sites où les succulentes ont résisté jusqu'à présent. Il y
aura eu encore un bon tri!
Quelques sites
avaient déjà été visités en 2006. La comparaison avec 2009-10 montre
que des espèces qui avaient à peine végété jusqu'en 2006, ont
disparu depuis. Plus curieux, certaines qui avaient disparu en 2006,
ont réapparu depuis. Je ne vois comme explication que leur état devait
être tel en 2006 qu'elles étaient soit méconnaissables, soit passées
inapercues. Ceci illustre le fait que souvent, les plants sont presque
détruits, mais se régénèrent à partir du peu qu'il reste.
Les facteurs limitants évoqués ci-dessus réduisent la portée des
observations. En effet, si on peut affirmer que telle espèce a
supporté le climat à tel endroit parce qu'elle s'y trouve encore, on ne
peut pas déduire de son absence, qu'elle y a gelé ou pourri, car sa
disparition est souvent accidentelle.
L'état des
plantes, de "végétant à peine" à "relativement bien développé" ne peut
pas non plus indiquer avec certitude le degré d'adaptation, car sur un
même lieu, on peut trouver plusieurs individus d'une espèce dans ces
états extrêmes.
On peut supposer qu'un plant a pu mieux se nourrir qu'un autre,
mais on ne voit pas de différence de situation sur le terrain.
L'interprétation des observations doit donc rester
très prudente.
Les résultats par site
après 10 à 12
saisons
En région
méditerranéenne, deux plantations ont été effectuées:
1 - Sur un plateau à 250 m
d'altitude, dans un friche entourée de vignes.
Fortement perturbée par un fort piétinement avec beaucoup
d'arrachage, ele a été interrompue au bout de trois ans, avec
récupération des plants. Aucun dégât climatique n'a été constaté, ce
qui était prévisible.
2 - Dans une garrigue en haut de pente
sud
peu abritée, à 50 m d'altitude, 40 m au dessus de la plaine. Le site
étant un peu fréquenté, surtout depuis les plantations, c'est
probablement le prélèvement par des amateurs qui a rapidement éliminé
les espèces autres qu' Opuntia inermis, peu attirant et Agave
americana americana, très répandu.
Dans les
côteaux mollassiques*,
une seule station s'est
conservée. Un autre, plutôt plus favorable,
a disparu. Elle était dans une pelouse très ouverte à Brachypodium
ramosum, (graminée très méditerranéenne, dont on ne connait que deux
stations dans la région toulousaine) et Sedum sediforme
avec Osyris alba et Pallenis spinosa, sur pente sud de plus de 45°
(soit plus de 100%). Une fréquentation humaine occasionnelle explique
peut-être la disparition des plantes.
Elles ont
été conservées sur une pente similaire, à 260 m d'altitude, soit 80 m
au
dessus du fond de vallée. La végétation y est semblable, sans
brachypode rameux, mais avec quelques Rhamnus alaternus et la pelouse y
est plus dense. Ces pentes en rive droite des rivières de la région
sont rajeunies par l'érosion pour les plus abruptes. Il semble
qu'auucune plante n'ait été éliminée par les hivers (ni prélevée,
malgré la présence de quelques habitations au dessus), car elles se
sont bien développées, même les plus fragiles (abîmées, mais assez
étendues). Celles qui n'ont pas été retrouvées ont dû être emportées
par un glissement de terrain récent tout à côté de ce qui reste.
Dans les
premiers reliefs pyrénéens
(300 à 750 m) situés entre Pamiers, Mirepoix, Lavelanet et Foix, aux
nombreux affleurements calcaires qui permettent une bonne pénétration
de la végétation méditerranéenne, certains sites ont conservé leurs
succulentes, d'autres les ont ont perdues, probablement pour des
raisons accidentelles. Le mieux conservé est le plus haut, une
pente calcaire abritée sous une crête, à 650m d'altitude,
200m au
dessus du fond de vallée, bordée de chênes-verts. Elle est peu visible
du sentier qui passe au dessus et qui doit être très peu fréquenté.
Certaines plantes y ont atteint un bon développement par rapport à la
plupart des sites.
Sur la chaîne la plus au sud du
Plantaurel,
autour de Foix, seuls le site le moins méditerranéen vers l'amont et
ceux situés sous ou sur la crête vers 650 m, n'ont plus rien. Ailleurs,
une bonne partie des plantes ont survécu. On y trouve le chêne vert,
l'alaterne, le thérébinthe, Jasminum fruticans, Lavandula latifolia,
Genista scorpius. Ils s'étagent de 400 à 500 m, soit 20 à 120 m
audessus
de la vallée. C'est le plus bas qui s'est révélé le plus favorable. La
végétation naturelle y comporte aussi du Phyllirea media en abondance
et une des très rares stations de Smilax aspera hors de la région
méditerranéenne et de la côte atlantique, plante qui serait sensible
aux gelées hivernales.
La zone des
Quiés de la Haute Ariège,
la plus méditerranéenne par sa position déjà interne à la chaîne (plus
sec et plus ensoleillé), ce qui se vérifie par la végétation naturelle,
a été plantée en priorité, en vain: je n'y ai rien retrouvé,
probablement pour des raisons qui n'ont rien de climatique.
Dans la zone
encore plus interne,
mais aussi plus haute et moins méditerranéenne , un seul site a
persisté, au pied d'un relief très abrupt exposé au sud,
abrité, à 760 m, 40 m
seulement au dessus de la vallée. Je n'ai rien retrouvé au
dessus, moins abrité, ni en d'autres lieux semblant au moins
aussi
favorables d'après l'exposition et la végétation naturelle, ni juste
sous les sommets de 1326 et 1376 m, où là, on peut invoquer la rudesse
d'ensemble de l'hiver, malgré l'excellente exposition. Le site qui
s'est révélé favorable est la
dernière station méditerranéenne vers l'amont, avec Jasminum fruticans,
Osyris alba, Pistacia terebinthus, et l'alaterne en limite de survie.
Les résultats par
espèces après
10 à 12 saisons
Aloe
aristata:
cet aloès, pourtant très rustique a été planté plusieurs fois, mais
jamais retrouvé. Il craint les expositions trop brûlantes, mais les
supporte et avait été planté à mi-ombre. L'arrachage par des animaux
pourrait ne pas lui avoir permis de supporter l'été à racines nues
avant de pouvoir reprendre.
Opuntia
stricta inermis:
très planté, il a disparu en de nombreux endroits, mais a été retrouvé
assez souvent. Il se contente souvent de végéter, mais s'est assez bien
développé à certains endroits: touffe
de 30 cm de diamètre dans la
zone interne de la chaîne et de 60 cm
en Bas-Languedoc. Rien à voir
toutefois avec les 1 ou 2 m qu'il aurait pu atteindre dans de bonnes
conditions!
Agave
americana americana:
mêmes observations que pour le précédent, avec des hauteurs de 20 à 40
cm. Le plus gros faisait 80
cm à 650 m dans les premiers reliefs
pyrénéens (il aurait pu atteindre 2 m dans de bonnes conditions).
Observé en mars 2010, il avait plus souffert de l'hiver que ceux du
jardin.
ESPECES BIEN RUSTIQUES AU JARDIN,
plantées plus rarement:
Les
Opuntia zuniensis, humifusa,
leucotricha, paraguayensis et basilaris, le Cylindropuntia spinosior,
n'ont pas été retrouvés.
Opuntia
lindheimeri: le meilleur
développement (80cm de large et 50 de
haut) a été atteint à la station interne.
Opuntia
robusta: n'a survécu qu'à la
station interne, avec de très
petites raquettes (15cm de long au maximum).
Opuntia
anacantha: n'a survécu que
dans les molasses: 17 raquettes de
taille normale sur 1,5 m de long (très étroit en largeur).
Opuntia
dulcis: a survécu en quelques endroits, peu développé, voire survivant à peine.
Opuntia
engelmannii 'Rastrera': végète à peine
Opuntia
macrocentra: a survécu dans
les molasses où il reste une quinzaine
de petites raquettes (hauteur totale: 40cm).
Cylindropuntia
kleiniae:
il a végété avant de mourrir, sauf sous
la crête des premiers reliefs,
où il a atteint 1,20m de haut avant
d'être couché par les grosses
chutes de neige de l'hiver 2009-10 (mais toujours vivant, avec peu de
dégâts).
Cylindropuntia
imbricata:
il a survécu en atteignant 30 cm à
la station interne, mais c'est sous
la même crête des premiers reliefs qu'il se porte le mieux: si certains végètent à peine, le
plus grand atteint 1m de haut pour un étalement de 70 cm (contre
plus
de 2 m en conditions favorables). Il est très peu développé sur une forte pente SSE abritée à
390m, soit 40m au dessus de
la rivière, dans les premiers reliefs.
Cylindropuntia
rosea:
il n'en subsiste que deux pieds de 30 et 40 cm, toujours sous la crête
et aussi sur la forte pente SSE indiquée ci-dessus. Quelques articles
tombés se sont
enracinés à proximité immédiate. Rien a voir, donc, avec l'invasion de
Celles (34), où les conditions de sol et de climat sont nettement plus
favorables. Sa sensibilité à l'humidité est aussi une entrave à son
expansion sous le ciel ariégeois.
Agave
salmiana:
planté plus tard que les autres sur une pelouse très pentue au
sud-ouest, au flanc d'une falaise, à 500m d'altitude (110m au dessus de
la vallée), il se porte très bien
et mesure près de 50 cm de haut.
ESPECES DE RUSTICITE LIMITE AU JARDIN
Les
Opuntia
semispinosa ( très sensible à l'humidité), monacantha,
ficus-indica, le
Cylindropuntia prolifera, qui souffrent souvent au
jardin, ont tous disparu.
Opuntia
ficus-indica rubra (épineux): il a végété jusqu'en 2006 en deux
endroits avant de disparaître.
Opuntia
ficus-indica rubra (inerme):
au meilleur site du Plantaurel, un
pied survit à peine, tandis qu'un
autre monte à 80 cm pour un étalement de 50 x 80cm.
Opuntia
bergeriana: un seul subsiste au meilleur site
du Plantaurel. Malgré des raquettes qui meurent, il atteint 55 cm.
Opuntia
keyensis : il n'a survécu que dans les molasses,
bien abîmé. Il conserve une vingtaine
de raquettes (au second plan sur la photo) pour une
hauteur de 60 cm.
Opuntia
microdasys pallida:
il ne subsiste que dans un site
proche et comparable à celui de l'Agave
salmiana, en bon état, de
développement relativement satisfaisant, avec
des raquettes de taille normale.
Agave ingens
marginata:
il ne subsiste au jardin qu'à flanc de rocher abrupt en plein soleil.
Il a pourtant résité en quatre endroits dans la nature:
- un pied de 45 cm avec des rejets au
meilleur site de Plantaurel,
- un
pied de 35 cm dans un autre site du Plantaurel, plus haut, très
abrité,
- sous une crête du Plantaurel, à 650
m (200m au dessus de la vallée), un
collègue l'avait remarqué quelques années après, bien développé, sur le
talus bordant une piste carrossable., mais il n'y est plus. Il est
peut-être dans un jardin, s'il n' est pas mort.
- une
grosse touffe
a subsisté sous la fameuse crête: deux sujets de 50 cm et plus de
20
autres petits. Elle semble avoir bien prospéré jusqu'en 2009, mais en
mars 2010, après un mauvais hiver, tout était mort, même des gros
coeurs, sauf quelques petites pousses protégées par d'autres feuilles,
mortes et affalées dessus, ainsi que quelques intérieurs de coeurs.
Aloe
maculata: un seul a subsisté sur le site très abrité du
Plantaurel.
Observations
au bout de 13 à 15 saisons, à la fin de la saison de pousse suivant la
vague de froid de février 2012
En
attendant la prochaine vague de froid trentenaire, celle de 2012, avec
-13°5, a été intermédiaire entre celle de 2005 (-11°) et
une trentenaire, où on peut s'attendre à environ 4° de moins (-17
à -18°), le minimum atteint à la station météo de Foix, 90m plus
bas ayant été de -15° en 2012 contre -19° en 1985 et depuis la création
de la station.
Une nouvelle visite des stations où
des plantes
avaient subsisté s'imposait donc pour vérifier lesquelles avaient été
éliminées par ces 2°5 supplémentaires de froid et la répétition de
fortes gelées.
Les résultats par
espèces
Le seul Aloe maculata (=saponaria) n'a pas survécu, tout comme
au jardin, là où il n'était pas abrité par de la roche en surplomb ou
de la végétation.
Les Agave americana
ont nettement plus souffert que précédemment, comme au jardin, sauf en
Bas-languedoc.
Certains, dans le Plantaurel, ont perdu le coeur, mais des rejets
ont été émis, sauf à une station où les pieds étaient très petits,
végétant dans des anfractuosités de la roche. Des pieds à
proximité et à même exposition ont pu garder leur coeur. C'est sous la
crête à 650 m d'altitude que les dégâts ont été les plus
importants. Dans les côteaux
mollassiques, malgré l'abri et l'excellente exposition, le pied semble
être
mort, comme ceux qui avaient été plantés par des particuliers, ça et
là, dans des conditions ordinaires. Le sol, toutefois, y est assez
argileux et, malgré la pente, reste assez humide en hiver. C'est
peut-être ce qui a fait la différence avec les pents rocheuses de la
montagne.
L'Agave ingens
marginata, le plus fragile, n'a
émis que quelques petits rejets à travers la litière constituée
par les feuilles gelées, puis séchées, sous la
crête à 650 m d'altitude. Au
meilleur site du Plantaurel, par contre, il a bien repoussé et se
trouve dans un état semblable à 3 ans plus tôt.
L'Agave salmiana a été aussi abîmé que dans le jardin,
sans plus, mais il n'a presque pas repoussé.
Les 3 espèces de Cylindropuntia
n'ont
montré aucun dégât et se sont même bien développés et multipliés en 3
saisons de pousse, laissant supposer qu'après un démarrage lent dans
ces conditions de sol difficiles, la croissance peut s'accélérer.
Le pied d'imbricata
de la station interne est toutefois mort, mais probablement pas de
froid: j'avais vu la zone saccagée (sanglier ou xénophobe
botanique?) en mai 2011 et il végétait auparavant..
Opuntia
stricta inermis
n'a pas souffert du froid en Bas-Languedoc et ne le semble pas non plus
dans l'Ariège, où il continue de végéter en produisant guère plus de
raquettes qu'il s'en sèche ou que les animaux détruisent. Le pied assez
gros de la zone interne avait été dispersé comme signalé ci-dessus et
une raquette s'est bouturée .
L'Opuntia
keyensis, assez bien
développé dans les molasses, est complètement mort.
L'Opuntia
macrocentra des
molasses n'a pas subit de dégât et s'est même mieux développé: un pied
plus petit est apparu plus bas, probablement suite à une casse et le
nombre total de raquettes en état sur les deux pieds est de 24, en
partie de taille normale, voire assez grande. Il pousse finalement
mieux qu'au jardin, où les nouvelles raquettes, peu nombreuses,
remplacent mal, visuellement, les anciennes qui se lignifient, d'où un
aspect peu esthétique. Le sol plus argileux serait-il plus favorable
pour cette espèce très rustique qui peut supporter l'inondation?
Opuntia
robusta, qui végétait à la
station interne a perdu ses raquettes, mais la souche en a refait une
petite en 2012.
L'Opuntia
anacantha qui
se développait assez bien dans les molasses, a manfestement été
abîmépar
le froid, comme au jardin de Lespinet, mais s'est encore étendu, au gré
des casses de raquettes, occupant maintenant une longueur de 2m, avec
deux fois plus de raquettes en état (probablement émises en 2012), mais
plus petites. La plantation que je connaissais en plaine toulousaine, a
été totalement éliminée. Contrairement à l'agave, cette exposition
s'est montrée bien plus favorable pour l'Opuntia.
L'Opuntia
microdasys pallida, en bon
état en 2009, a presque disparu: seule une bouture protégée par les
herbes a fait une raquette de 2 cm.
Sur les deux Opuntia
ficus-indica rubra,
un seul a refait une pousse, longue et étroite, à partir d'un bout de
souche rescapé. Au jardin, un Opuntia streptacantha, de rusticité
voisine, a fait de même.
Les Opuntia
lindheimeri et dulcis
subsistent en végétant, les raquettes plus ou moins séchées devant
plutôt être attribuées aux conditions de sol et de concurrence.
Le
pied bien développé du premier à la station interne, saccagé avant mai
2011, a réussi à enraciner 6 boutures, mais qui n'ont quasiment
pas poussé en 2012.
Je n'ai pas retrouvé d'Opuntia
engelmannii rastrera, qui ont
plutôt dû disparaître accidentellement, ni l'Opuntia
bergeriana peu rustique, qui a
pû être éliminé par le froid.
Par contre, quelques pieds d'Opuntia
humifusa compressa et d'Opuntia
debreczyi
très peu développés, mais n'ayant pas souffert du froid, ont été
retrouvés, après avoir échappé à mon regard trois ans plus tôt.
Observations
au bout de 19 à 21 saisons, soit 7 saisons de pousse après la vague de
froid de 2012:
Les hivers de cette
période ont été moins froids que la moyenne, ne pouvant pas causer de
dégât de gel. Les conditions ont donc été favorables à une bonne
reprise, ce qui
a été le cas de certaines plantes, mais pas d'autres, sans qu'on puisse
différencier l'influence de
la vague de froid dont elles ne parviendraient pas à se remettre, de
celle des agressions subies en milieu hostile (concurrence de la
végétation naturelle,déprédations par les animaux...).
Les résultats par
espèces
Les Agave americana ont
nettement augmenté en nombre et en surface occupé. Quelques uns sont
moins hauts (le pied mère ayant été éliminé, plutôt accidentellement,
remplacé par des rejets), mais les autres ont bien poussé, mêmes ceux
qui semblaient encore mal en point à l'automne 2012. Ler plus haut
mesure 60 cm. Dans les côteaux
mollassiques, le pied est réapparu avec deux pieds de 30 et 35cm,
ce qui laisse supposer que deux rejets ou au moins des rhyzomes
avaient survécu cachés dans l'herbe ou dans le sol.
Les Agave ingens
marginata, se sont bien
multipliés et ont bien poussé, même sous
la
crête à 650 m d'altitude, d'où
il avait presque disparu en 2012. Les plus hauts mesurent 55cm.
L'Agave salmiana , qui n'avait pas repoussé la première
année après le gel, est maintenant en excellent état et mesure 90cm
avec deux rejets..
Les 3 espèces de Cylindropuntia
se sont
bien multipliés et ont bien poussé, occupant encore plus d'espace. Le
rosea le plus haut mesure 60 cm et les autres espèces vont
jusqu'à 100cm, soit moins
qu'en 2012, car les plus hauts se sont couchés ert repoussent
verticalement depuis les troncs couchés. Du
fait de l'extension progressive des deux plantations de Cylindropuntia
rosea, je compte récupérer tout ce qui reste de vivant lors de ma
prochaine visite pour éviter de reproduire la situation évoquée plus
haut. Toutefois, je n'ai vu aucun autre pied qui aurait essaimé aux
environs, transporté par des animaux, même dans la zone aride où se
trouvent les essais. Au delà, la végétation naturelle bien plus
fournie, ne permettrait probablement pas leur survie.
Certains Opuntia
stricta inermis
continuent de végéter en produisant guère plus de
raquettes qu'il s'en sèche ou que les animaux détruisent. Certains
prennent toutefois un peu d'ampleur. Seuls ceux du Bas-Languedoc
se
sont bien développés, en nombre du fait des casses de raquettes par les
animaux, mais aussi en taille pour certains pieds, malgré les casses.
L'Opuntia
macrocentra des
molasses s'est bien développé pour atteindre 45 cm de haut et occuper
70 cm x 40 cm. Je me demandais s'il ne préférait pas l'argile au
terrain drainé du jardin, mais depuis, dans le jardin, j'ai du mal à le
conserver car il pourrit facilement, même dans du sable et très bien
exposé, ce
qui est contradictoire avec son comportement initial et surtout la
situation antérieure même souche) où il supportait l'hiver dans
une jardinière à l'ombre et à la pluie, sans trou de drainage!
Opuntia
robusta,
à la station interne, existe toujours avec 9 raquettes de 5cm maximum
sur 1 ou 2 niveaux, sur une vielle souche. On est loin des raquettes de
60 cm qu'il peut faire dans des conditions optimales!
L'Opuntia
anacantha, dans les molasses,
a poursuivi son développement et occupe maintenant 2,2 m sur 1,6 m,
pour 1,3 m de haut.
L'Opuntia
microdasys pallida, qui
n'avait qu' une raquette de 2 cm sur un bout de souche protégé par les
herbes, n'a pas été retrouvé.
L' Opuntia
ficus-indica rubra,
qui avait survécu au froid n'a pas été retrouvé, tout
comme les autres plantes de ce lieu qui subsistaient et très rustiques
(O. debreczii et humifusa compressa). L'hypothèse la plus vraisemblable
semble être un prélèvement intempestif.
Certains Opuntia
lindheimeri et dulcis
continuent de subsister en végétant,voir en périclitant et certains ont
même disparu.
Le
pied bien développé du premier à la station interne, saccagé avant mai
2011, a réussi à enraciner 6 boutures, mais qui n'ont quasiment
pas poussé en 2012.
Remarque: de gros dégâts de
mollusques (limaces et escargots) touchaient
les deux Opuntia des molasses (anacantha et macrocentra) tandis qu'on
n'en remarque guère ailleurs. Ce qui peut le favoriser est la
végétation herbeuse dans laquelle ils se trouvent et où les mollusques
trouvent refuge à proximité immédiate des jeunes raquettes tendres du
printemps.
J'ai constaté aussi sur ce site que
la zone où se trouvent les plantes avait glissé d'environ 1 mètre, le
décrochement étant bien visible au dessus. Lors de la prochaine visite,
il se peut que l'ensemble ait été précipité au bas de la pente.
*
Dans le Bassin Aquitain, on appelle "molasses" les terrains
sédimentaires qui se sont déposés suite à la surrection des Pyrénées.
Ils sont constitués de couches horizontales superposées alternant des
argiles, des sables fluviatiles et des calcaires lacustres. Les
rivières actuelles issues des Pyrénées ou de leur piedmont ont, au
cours du quaternaire et au gré des glaciations, creusé des vallées qui
se sont déplacées progressivement vers l'est, laissant des rives
gauches en glacis partiellement recouverts de terrasses alluviales et
formant des rives droites abruptes où, par endroits, des effondrements
maintiennent encore des parois subverticales, voire de véritables
falaises, où la stratification apparait bien à nu. Ce sont les endroits
les plus favorables pour la pénétration des espèces végétales
d'affinité méditerranéenne. Les pentes sont généralement à peu près
orientées vers l'ouest, mais au gré des méandres des rivières, elle
peuvent être au sud-ouest voire au sud, ce qui est encore plus
favorable.
La
cause de ce déplacement des rivières vers l'est reste mystérieuse. Il
peut toutefois être inversé si la rivière est repoussée par des
alluvions apportés par un affluent venant de l'est (c'est le cas pour
l'Ariège au niveau de Pamiers, en face de l'arrivée de l'Hers Vif). Les
pentes abruptes sont alors orientées vers l'est, ce qui est encore plus
favorable.